ALIGOT BOXING PARTY SUR L’AUBRAC
Le cabrette a fini de grincer, les sabots ont fini de claquer, premier combat, deux jeunots se penchent entre les cordes, à peine sortis du bac à sable, casqués, gantés pour un premier combat. Petites guibolles frêles mais ça frappe fort, les joues se déforment, ça avance, ça recule. En bas du ring, le frangin filme en facebook live, un gaminou sautille comme une puce «moi aussi je veux boxer», le père de dire «toi tu te calmes». Verdict, on lève un bras droit, un bras gauche, égalité.
Quand la boxe s’invite en terre d’Aubrac à l’heure des premiers frimas, on dresse les nappes blanches, on tamise la lumière, on met le rosé au frais, les petits plats dans les grands, c’est le pâté en tranche, c’est l’aligot qui file, c’est la viande qui fume, on sait recevoir et sur le ring, baigné d’une lumière rougeoyante et puissante, les gars…et deux filles…font le spectacle.
Les assiettes valsent…bang bang…les coups pleuvent, les convives s’émeuvent. Les plats défilent…bang bang…les gauche–droite s’enchaînent, sur les chaises, ça frétille, sur le ring, ça vacille.
C’est déjà l’entracte, les huiles se serrent, Préfète en jupette, sénateur grand et sec, Jean Valadier le poids lourd de l’Aubrac au centre de cette lignée d’élus et de notables. Applaudissements, ils reçoivent en cadeau un couteau de Laguiole. Sur le ring, le speaker en costard déclare « va falloir donner un euro». Tradition oblige.
Au pied du carré rouge, Miss Aubrac riboule des yeux de velours. Un boxeur taille poids coq, épongé, en tee-shirt moulé, l’arcade gonflée, tourne autour et joue les mamours.
C’est déjà l’heure du dessert, c’est tartelette aux pommes sur son lit de compote. On sort les seaux à champagne. Dans les verres, ça pétille, sur le ring, un légionnaire s’engage dans la baston, son colon est fébrile, ça se joue aux poings…bang bang…ça se gagne aux points. La boxe, c’est comme un jour de concours à bestiaux. Un ring, c’est comme sur le foirail de Nasbinals, ce n’est pas un pré carré pour les tourtereaux, on ne se lance pas des pétales, c’est toujours le plus fort qui fait son nid.